Les dix cuisiniers les plus célèbres de la Chine ancienne

Les Chinois sont fiers de leur génie culinaire, et se targuent en outre d’avoir une histoire de plus de 5000 ans. Pendant ces cinq millénaires, de nombreuses figures plus ou moins mythiques de cuisiniers experts ont vu le jour. Il n’est certainement pas possible de les citer tous, mais je vous propose ci-dessous de faire rapidement connaissance avec les dix maîtres-queue les plus renommés de la Chine ancienne.
1. Yi Yin (伊尹 [yī yǐn])
Yi Yin vécut environ entre 1600 et 1549 avant l’ère chrétienne, au début de la dynastie des Shang. Il fut ministre de l’empereur Tang. Il fut surnommé « grand sage de l’art culinaire » (烹调之圣 [péngtiáo zhī sheng]). Ses talents culinaires étaient tels que l’empereur Tang des Shang fit d’abord de lui son cuisinier personnel, avant de lui confier une charge officielle. Il aurait en outre été l’auteur d’un très célèbre traité de médecine chinoise, le Traité des décoctions (《汤液经》 [tāngyèjīng]), qui est perdu depuis plus d’un millénaire.
2. Yi Ya (易牙 [yì yǎ])
Yi Ya, connu aussi sous le nom de Di Ya (狄牙 [dí yǎ]), était au service du Duc Heng de Qi (齐恒公 [qí héng gōng]), qui appréciait ses talents culinaire. La légende dit qu’un jour, le Duc Heng dit à son cuisinier qu’il avait déjà goûté à tout, sauf à la chair d’un nourrisson. Pour satisfaire son maître, Yi Ya aurait tout simplement sacrifié son propre fils pour le donner à manger au duc Heng !
3. Maître Taihe (太和公 [tàihégōng])
Originaire de ce qui est aujourd’hui la ville de Wuxi, dans la principauté de Wu, Taihe vécut à la fin de la période des Printemps et Automnes (fin du Ve siècle avant notre ère). Il excellait notamment dans la préparation des produits aquatiques (Wuxi se trouve sur la rive septentrionale du lac Taihu, connu pour la richesse de sa faune aquatique). La concubine favorite du prince de Wu raffolait de sa cuisine.
4. Shanzu (膳祖 [shànzǔ])
Shanxu, cuisinière de talent, vécut à l’époque des Tang. Elle était la cuisinière de Duan Wenchang (段文昌 [duàn wénchāng], 773-835 de notre ère), qui fut premier ministre de l’empereur Muzong des Tang. On attribue à Duan Wenchang la rédaction d’un Traité sur la nourriture (《食经》 shíjīng), en cinquante chapitres (aujourd’hui perdu), qu’il composa à l’usage de sa cuisinière Shangzu. Cette dernière, sur la base de cet ouvrage, atteignit une maîtrise culinaire inégalée, qui s’exprimait par un réel talent pour le choix des ingrédients, pour l’utilisation des épices et pour la maîtrise de la cuisson.
5. Fanzheng (梵正 [fànzhèng])
Fanzheng était une nonne bouddhiste qui vécut à l’époque des Cinq Dynasties (903-960 environ). C’est à elle que l’on attribue l’invention des plats dits « plateaux » (拼盘 [pīnpán]), dans lesquels sont disposés plusieurs aliments différents. L’esthétique de ces plats est souvent assez élaborée. De ses plats, on a dit que « la nourriture est paysage, l’assiette est poésie » (菜上有山水,盘中溢诗歌).
6. Liu Niangzi (刘娘子 [liú niángzǐ])
Liu Niangzi vécut à l’époque des Song du Sud (1127-1279). Elle fut chef de cuisine de la cour impériale de l’empereur Gaozong. Ce fut la première femme à occuper ce poste officiel. Avant d’être nommée à ce poste officiel, on raconte qu’un jour, elle se présenta devant l’empereur attablé. Ce dernier lui dit ce qu’il voulait manger, et Liu Niangzi prépara immédiatement le plat devant lui. L’empereur fut si satisfait qu’il dérogea à la règle qui voulait que le poste de chef des cuisines impériales devait être un homme, et nomma Liu Niangzi à ce poste.
7. Song-la-cinquième (宋五嫂 [sòng wǔsǎo])
Song-la-cinquième vécut également à l’époque des Song du Sud. On raconte qu’en 1175, l’empereur Xiaozong des Song se promenait sur les rives du célèbre Lac de l’Ouest (à Hangzhou). Il s’arrêta pour interroger les marchands qui se trouvaient là, et interrogea Song-la-cinquième, qui tenait un petit restaurant. Celle-ci lui raconta qu’elle était originaire de l’ancienne capitale (Kaifeng), et que, par patriotisme, elle avait gagné Hangzhou lorsque les Jin avaient envahi le nord de l’Empire des Song. Touché par son patriotisme, Xiaozong rentra dans son restaurant. Madame Song se mit alors en devoir de lui préparer un plat de son invention : le « poisson cuit au vinaigre » (醋熘鱼 [cùliūyú]). Ce plat fait encore aujourd’hui partie des spécialités les plus renommées de Hangzhou.
8. Dong Xiaowan (董小宛 [dǒng xiǎowǎn])
C’est la « belle cuisinière » (美人厨师 [měirén chǔshī]) dont Sinogastronomie a déjà parlé ici.
9. Xiao-la-belle (萧美人 [xiāo měirén])
Xiao-la-belle était réputée pour son expertise dans la préparation des « en-cas » (ou « dim sum »). Elle vécut à l’époque du règne de l’empereur Qianlong des Qing (r. 1771 à 1799). Dans son Traité de gastronomie du jardin de la nonchalance (voir ici), Yuan Mei fait l’éloge de ses préparations dont il dit qu’elles étaient « d’une grande finesse, et d’une blancheur égale à celle de la neige ».
10. Wang Xiaoyu (王小余 [wáng xiǎoyú])
Wang Xiaoyu fut le cuisinier de l’empereur Qianlong. Il excellait dans la préparation des viandes, et ses plats exhalaient un parfum qui était paraît-il irrésistible. On dit qu’il fut la principale source d’inspiration de Yuan Mei lorsque ce dernier composa son Traité de gastronomie du jardin de la nonchalance.
(Notez que la composition de la liste des « dix plus grands cuisiniers de la Chine ancienne » peut varier un peu d’un auteur à l’autre. Pour ce billet, je suis inspiré en partie de l’article en chinois que Baidu consacre ici à ce sujet. Si vous désirez en savoir plus, cet article donne des détails concernant les dix cuisiniers cités ci-dessus.)
Ci-dessous, le « poisson cuit au vinaigre » de Hangzhou. La photo vient d’ici.
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2 commentaires pour Les dix cuisiniers les plus célèbres de la Chine ancienne

  1. Pour les gastronomes amateurs de lecture, le sympathique roman de Pascal Vatinel, L’affaire du Cuisinier Chinois, vaut le détour…

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