Spécial Huai’an (pour le plaisir) : Des raviolis qui n’en sont pas (淮饺)

Parmi les spécialité huai’anaises, les « raviolis de Huai’an » (淮饺 [huáijiǎo]) et les trois façons de les déguster (淮饺三吃 [huáijiǎo sānchī]) jouissent en Chine d’une renommée certaine. Seul souci, pour quiconque n’a jamais eu la chance de déguster cette spécialité, c’est que l’on risque de s’imaginer qu’il s’agit de « raviolis » (饺子 [jiǎozi]), tels qu’on en trouve dans le Nord de la Chine : une enveloppe de pâte fabriquée à partir de farine de blé et d’eau, assez épaisse et solide, avec une farce comportant classiquement du porc haché et du chou chinois, le tout cuit à l’eau bouillante. Or, le « ravioli » de Huai’an, ce n’est pas cela du tout ! Tout Chinois normalement constitué voyant pour la première fois ce mets dirait certainement qu’il s’agit de « wonton » (馄饨 [húndùn]), et certainement pas « ravioli ».
La différence technique essentielle entre le ravioli et le wonton réside dans la façon d’envelopper la farce : pour le ravioli, l’enveloppe se présente sous la forme d’un disque, au centre duquel on dépose la farce et dont les bords sont soudés par pression, tandis que pour le wonton, l’enveloppe est carrée à l’origine, la farce est placée au milieu, et l’enveloppe est repliée de façon à former un petit paquet, sans réelle soudure. C’est sans le moindre doute à cette seconde catégorie qu’appartiennent les « raviolis » de Huai’an.
Par rapport aux autres wontons habituellement rencontrés en Chine, les raviolis de Huai’an se distinguent par trois traits originaux :
Tout d’abord, il s’agit de la finesse de la pâte utilisée pour confectionner l’enveloppe. Cette pâte est si fine qu’on la compare à une feuille de papier et qu’on la dit presque transparente : il paraît que l’on peut lire à travers un carré de pâte qui serait posé sur un livre, on dit même que si l’on approche une allumette de la pâte, celle-ci peut s’enflammer.
Le deuxième point caractéristique est la façon dont est préparée la viande de porc qui entre dans la composition de la pâte. Si, aussi bien pour les wontons que pour les raviolis classiques, on utilise de la viande de porc hachée à laquelle on mêle les autres ingrédients, pour les raviolis de Huai’an, on pilonne longuement la viande de porc (ce type de préparation 肉燕 [ròuyàn], littéralement « viande en hirondelle ») : avant pilonnage, la viande est très soigneusement dénervée, puis elle pilonnée jusqu’à produire une pâte homogène fine et lisse. Le porc est ensuite complété avec de la ciboule de Chine, de la ciboulette et du jus de gingembre.
Enfin, j’en parlais au début de ce billet, il existe à Huai’an trois façons de déguster ces raviolis : la manière classique consiste à les faire cuire à l’eau et à les déguster dans un bouillon, le plus souvent de volaille, agrémenté de poivre moulu (on parle de 煮饺 [zhǔjiǎo] : raviolis cuits à l’eau) ; la seconde façon consiste à frire les wontons directement dans l’huile : la finesse de la pâte permet d’obtenir une fine feuille très croustillante (on parle dans ce cas de 炸饺 [zhàjiǎo] : raviolis frits) ; et enfin, on peut les servir en « salade » : les raviolis sont cuits à l’eau, puis servis « à sec » dans une petite assiette et agrémentés de ciboulette ciselée (ce sont les 拌饺 [bànjiǎo]).
Ces trois façons d’accommoder les raviolis de Huai’an sont servies le plus souvent au petit déjeuner.
Ci-dessous, le bol de raviolis de Huai’an en bouillon de volaille que je dégustai avec bonheur, dans un tout petit restaurant caché dans une ruelle proche de l’hôtel qui m’hébergeais, le 23 août 2014 vers les sept heures du matin :
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2 commentaires pour Spécial Huai’an (pour le plaisir) : Des raviolis qui n’en sont pas (淮饺)

  1. chris 06 dit :

    Bonjour mon Ami
    J’avais pas mal de retard dans la lecture de tes articles si enrichissants.
    En France nous avons la pâte à raviolis traditionnelle , mais peut-on trouver cette petite merveille surgelée??? et sous quel nom??? Je te pose certainement une colle .
    J’ai toujours au congel du bouillon de poulet, et de la soupe chinoise.
    La seule chose que je ne trouve pas, c’est la vraie ciboule. A Nice, il n’y a que 2 magasins, et impossible de se garer. Les PV pleuvent………….
    C’est toujours un plaisir de te lire, car avec toi, je me suis beaucoup instruite.
    Grand Merci et bien amicalement de ma Côte d’Azur. Chris 06

  2. Chantal Pistol dit :

    Vous me faite saliver évidement la pâte doit être plus fine que celle que nous trouvons en France?
    Chantal.

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