Ingrédients (23) : Anguille de marais

Si vous vous promenez sur les marchés d’Asie tropicale et subtropicale et que vous vous intéressez aux étals des poissonniers, vous remarquerez certainement un poisson long, serpentiforme, de couleur orangée à brunâtre ou verdâtre, ressemblant aux anguilles bien connues chez nous, mais plus minces.
Il s’agit de l’anguille du marais, appelée également anguille de riz, anguille asiatique de marais, en anglais « rice swamp eel », en chinois 黄鳝 huángshàn, 鳝鱼 shànyú ou 长鱼 chángyú, en khmer អន្ទុង (prononcer « ân-toung »), de son nom savant Monopterus albus.
C’est en Chine que j’ai fait la connaissance de l’animal. En effet, dans la ville où je demeurais, Suzhou, cette anguille était omniprésente sur les marchés. D’une chair délicate, elle est cuisinée de multiples façons. En Chine, l’anguille des marais la plus renommée est celle que l’on trouve dans la ville de Huaian, dans le Nord de la province du Jiangsu. Les cuisiniers de cette ville ont poussé l’art de la préparation du « long poisson » (长鱼 chángyǔ), telle que l’anguille est appelée localement, à son zénith, et ont imagé pas moins de 108 plats différents préparés à partir de cette bestiole. Si vous avez l’occasion de passer par Huaian, il faut absolument en goûter quelques-uns (je vous recommande vivement le 软兜长鱼 ruǎndǒu chángyú, préparation riche en ail, dans laquelle l’anguille est fondante, ou encore le 马鞍桥 mǎànqiáo, plat dans lequel l’anguille est préparée en sauce rouge, avec de la poitrine de porc).
Dans la région du Jiangnan (Suzhou, Shanghai, Nanjing, Hangzhou, etc.), on prépare un plat célèbre dans toute la Chine, appelé 善 糊 shànhú (littéralement « bouillie d’anguilles »), confectionné à partir de fins filaments d’anguilles agrémentés de sauce de soja, d’ail, de gingembre, de ciboulette… Si vous êtes amateur de nouilles à la suzhoulaise, vous pourrez également choisir un accompagnement de vos nouilles des filaments d’anguilles frits, croquant sous la dente. J’ai pour ma part essayé de cuisiner l’anguille de marais à la française, légèrement farinée, avec de l’ail et du persil, et le résultat était ma foi tout à fait acceptable.
Monopterus albus est présente dans toute l’Asie tropicale, de l’Inde jusqu’en Chine du Sud. Elle est en général longue d’une quarantaine de centimètres, mais peut atteindre dans les cas extrêmes un mètre de long. Elle vit dans les marais peu profonds. Elle fait aujourd’hui l’objet d’un élevage, mais les anguilles d’élevage ont souvent un goût terreux désagréable que n’ont pas les anguilles sauvages.
Attention : l’anguille des marais doit absolument être consommée fraîche. Peu de temps après la mort de l’animal, la chair dégage en effet une toxine, au point que certains cuisiniers chinois n’hésitent pas à plonger les anguilles vivantes dans les casseroles d’eau !
Vous trouverez de plus amples informations concernant cette anguille sur le site Fishbase (ici), ou encore, si vous lisez le chinois, sur Baidu (ici). La photo qui illustre ce billet vient d’ici.

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