Ingrédients : Introduction aux lyciets chinois

On appelle « lyciets » les végétaux du genre Lycium, de la famille des Solénacées (même famille que la tomate, par exemple). Ce genre compte environ 70 espèces, dont plusieurs sont présentes en Chine.
En Europe, les lyciets chinois sont connus sous le nom de « goji », mot emprunté au chinois 枸杞 [gǒuqǐ]. Ce végétal est connu depuis longtemps en Chine. Depuis l’antiquité chinoise, le goji est réputé pour ses petites baies rouges à orangées, auxquelles les médecins de l’Empire du milieu attribuent diverses vertus. Elles permettraient de traiter diverses affections, notamment du foie et des reins.
Les espèces présentes en Chine sont les suivantes :
Lycium barbarum (宁夏枸己 [níngxià gǒuqǐ], littéralement « goji du Ningxia » – le Ningxia est une région autonome de l’Ouest de la Chine, située au sud de la Mongolie intérieure), connu en français sous les noms de lyciet commun et de lyciet de Barbarie. C’est l’espèce la plus connue, la plus exploitée et la plus renommée. Ce sont le plus souvent les baies de cette espèce qui sont exportées ;
Lycium chinense (枸杞 [gǒuqǐ]), tout simplement « goji », ou « goji du Nord » (北方枸杞 [běifāng gǒuqǐ]), appelé en français lyciet de Chine, que l’on trouve principalement dans les provinces du Shanxi, du Shaanxi, de Mongolie intérieure, du Ningxia, du Qinghai et du Gansu. Cette espèce est aussi exploitée, mais les baies produites sont de moins bonne qualité ;
Lycium ruthenicum (黑果枸杞 [hēiguǒ gǒuqǐ]), « goji à baies noires », moins connu mais à la mode ces derniers temps. Nous aurons l’occasion d’en reparler sur Sinogastronomie ;
Lycium cylindricum (柱筒枸杞 [zhùtóng gǒuqǐ]), « goji cylindrique » et Lycium dasystemum (新疆枸杞 [xīnjiāng gǒuqǐ]) (une sous-espèce de cette espèce est aussi appelée 红枝枸杞 [hóngzhī gǒuqǐ], « goji à branches rouges »), qui sont des espèces à la production limitée et qui ne sont utilisées que localement.
Outre les fameuses « baies de goji » (枸杞子 [gǒuqǐzǐ]), qui entrent dans la composition de divers plats et sont également utilisées en médecine chinoise, les jeunes feuilles peuvent aussi être utilisées pour fabriquer une boisson théiforme et même être consommées en légumes.
Une émission d’environ 24 minutes de la « chaîne de l’agriculture » (CCTV) explique par le détail la transformation des baies de goji et la fabrication du thé et des légumes produits à partir des jeunes feuilles. Si vous comprenez le chinois, je vous recommande vivement de la visionner sur Youtube, ici.
Ci-dessous, une plantation de goji dans le Ningxia (l’image vient du site d’une société qui cultive ce végétal, voir ici) :

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2 commentaires pour Ingrédients : Introduction aux lyciets chinois

  1. georges varet dit :

    Les baies du Lyciet, connue sous le nom de Goji, sont devenues très à la mode depuis quelques années dans les rayons des magasins Bio. Elles font partie des produits indissociables de la médecine traditionnelle chinoise.

    Le nom latin lycium barbarum indique la provenance supposée de Lycie, une ancienne province de l’Asie mineure, sur la côte de l’actuelle Turquie en face de l’ile de Rhodes, le terme barbarum désignant plutôt l’Afrique du Nord. C’est un arbre à grande capacité d’adaptation et, s’il est aujourd’hui très abondant de la Mongolie au nord ouest de la Chine, il est également présent dans presque tous les départements français. Il existe aussi en Chine, dans le reste de l’Asie et dans l’Europe méditerranéenne, une autre espèce, lycium chinense, le lyciet de Chine, au fruit plus amer et de moindre qualité nutritionnelle. Un autre lyciet, dit d’Europe ou olivet, est un arbrisseau de 1 à 3 mètres de haut, assez touffu, à rameaux raides, non pendants, très épineux. A cause de ses épines courtes et robustes, il est parfois appelé couronne du Christ et sert à faire des haies impénétrables. Nous parlerons ici essentiellement du lycium barbarum.

    Le terme Goji a été fabriqué par un ethnobotaniste américain, dans les années 70, lors d’une collecte de plantes médicinales dans les montagnes du Tibet . Il a commencé à vendre ces fruits dans une pharmacie et une clinique à Seattle, sur la côte ouest des USA. La mode était lancée et les producteurs chinois décidèrent de partir à la conquête des marchés mondiaux. Le lyciet est cultivé sur de grandes surfaces en Chine, entre la Mongolie et les provinces musulmanes et surtout dans le district de Zhong Ning de la province du Ning Xia où l’on trouve aujourd’hui un musée en son honneur. Le fleuve jaune qui la traverse permet l’irrigation de la vallée, et la commercialisation à l’international des fruits et des produits dérivés a multiplié la valeur de la production par 80 lors de ces 10 dernières années malgré l’effondrement des exportations vers les USA, leurs services d’hygiène ayant vérifié dans les lots de baies de Goji « bios » des taux très élevés de résidus d’insecticides et de pesticides. Le gouvernement chinois, ne voulant pas perdre sa poule aux œufs d’or, prétend avoir pris des mesures strictes à cet égard et assure que ce problème est aujourd’hui résolu.
    Désormais on peut trouver le « goji » séché presque partout mais la qualité peut être très variable. Il sera certainement plus judicieux pour ceux qui peuvent se le permettre de cultiver eux-mêmes leurs arbrisseaux.

    Le lyciet barbarum est en effet un petit arbuste de la famille des solanacées (comme la pomme de terre ou la tomate) qui peut atteindre la taille de 2 mètres avec de nombreux rameaux légèrement épineux et qui est souvent utilisé en combinaison avec d’autres arbres pour faire des haies champêtres ou gourmandes. Le lyciet montre un port souple et retombant. Il devient vite broussailleux si l’on n’y prend garde.
    Cet arbuste se contente de sols pauvres et ne craint guère les parasites ou maladies. Mieux vaut donc le cultiver « à la dure ». La méthode de multiplication la plus simple est le semi : mettez à gonfler les baies de goji séchées dans de l’eau durant 3 heures au minimum (si possible une nuit) puis extrayez les graines au tamis après avoir découpé la baie. Comptez entre 5 et 15 jours pour voir apparaître les cotylédons. Les plants supportent moyennement un repiquage tardif, et peuvent mettre plusieurs semaines afin de reprendre une croissance normale. Il est préférable de procéder à cette opération durant la deuxième semaine et dans le cas de la germination en pot, en conservant le terreau autour des radicelles.
    Le bouturage est également possible et l’on trouve aussi maintenant les plants dans de nombreuses pépinières.
    Ses besoins sont modestes : apportez lui un peu de compost mûr en période végétative, arrosez régulièrement les plants en période estivale (un bon paillage permettra de conserver la fraicheur du sol plus longtemps), pincez les extrémités des pousses pour étoffer le pied et tuteurez-le. La deuxième année de plantation, les longues tiges du lyciet peuvent devenir exubérantes, voire envahissantes. Il faut les soutenir et les diriger.
    Il peut également être cultivé dans un grand bac et installé au balcon ou sur une terrasse. Sa floraison, à peine parfumée, est mellifère et attire les insectes pollinisateurs. Les fleurs sont suivies de baies orangées qui deviennent bien rouges en mûrissant. Ces baies, qui sont abondantes, décorent l’arbuste en automne et une partie de l’hiver. Elles sont comestibles lorsqu’elles sont bien mûres. Attention, les baies du lyciet, comme tous les fruits des solanacées, se consomment uniquement lorsqu’elles sont bien mûres. Si elles sont vertes, elles sont toxiques. On les récoltera en plaçant une toile sous l’arbuste que l’on secouera, pour les faire tomber à pleine maturité. Il ne faut pas récolter immédiatement après la pluie et manipuler les fruits avec délicatesse, pour éviter la compression ou les meurtrissures, qui les feraient noircir. Pour les conserver, vous pouvez les congeler ou les faire sécher, à moins de 40°C.

    Autrefois, les jeunes feuilles du lyciet étaient consommées cuites en Sicile et mangées avec de l’huile d’olive et du citron ou poêlées avec des œufs et des oignons. Dans les campagnes aux environs d’Aix et de Montpellier, on mangeait ses jeunes pousses avec de l’huile et du vinaigre, comme des asperges et les feuilles étaient mises en salades. On en faisait les mêmes usages en Espagne selon le dictionnaire des sciences naturelles de 1823. On se rappellera quand même de la toxicité des solanacées avant de tenter des expériences culinaires. Aujourd’hui on emploie ses feuilles sous forme d’alcoolature pour les toux spasmodiques de la coqueluche ou l’irritation laryngée des orateurs à raison de 30 à 60 gouttes par jour en trois fois en dehors des repas.
    En chine, on emploie les feuilles Gou Qi Ye, surnommées aussi Tian Jing Cao, de saveur amère et douce, de nature fraîche, pour tempérer le foyer supérieur, le Cœur et le Poumon. On les prend en infusion en remplacement du thé pour traiter la soif.

    L’écorce de sa racine, nommée Di Gu Pi, douce, fade et froide, clarifie la chaleur vide, la chaleur du sang et la chaleur du Poumon. On l’utilise dans les fièvres dues à la déficience du Yin, dans les hémorragies dues à la chaleur du sang et pour les toux et les dyspnées dues à la chaleur du Poumon, particulièrement avec l’écorce du murier Sang Bai Pi dans la poudre pour drainer le blanc, Xie Bai San.

    Les petites baies rouges du lyciet, sucrées mais fades, ont été consommées, cuites, en Inde et en Afrique du Nord.
    En Chine, il est conseillé de consommer les fruits de lyciet comme tonifiant du Yin, dans des soupes, des bouillies avec du riz ou dans des plats de légumes et de poulet. On les retrouve par exemple braisées à la manière cantonaise avec des feuilles de moutarde brune, ou dans une autre recette de soupe de crevettes au « goji » où l’on fait blondir dans un peu d’huile de l’oignon émincé, puis on y verse les baies de « goji » et de l’eau bouillante, et enfin les crevettes. Lorsque la soupe commence à bouillir, on rajoute l’assaisonnement au choix et on enlève l’écume. Avant de servir, on parsème de ciboulette hachée menue.
    On peut aussi faire infuser les baies avec du thé ou des fleurs de chrysanthème.
    Comme « fortifiant », on trouve aussi une liqueur de « goji », obtenue en faisant macérer des fruits avec du ginseng, une quinzaine de jours, dans de l’alcool blanc.

    La Médecine traditionnelle chinoise utilise principalement les fruits séchés sous le nom de Gou Qi Zi, de nature neutre et de saveur douce, en posologie de 5 à 10 g. Il tonifie le Yin, stimule le Jing et le sang. Par ailleurs, il nourrit les Reins, le Foie et humidifie le Poumon.
    Pour traiter les vertiges et les troubles de la vue, cataracte, rétinite, glaucome ou la baisse de l’acuité visuelle, dus à la déficience du Yin du Foie et du Rein, il est rajouté avec Ju Hua, le chrysanthème, à Liu Wei Di Huang Wan, la formule à base de Shu Di Huang pour traiter le vide de Yin et qui s’appellera dans ce cas Qi Ju Di Huang Wan.
    Si le vide de Yin entraine plutôt des courbatures et de la faiblesse des lombes, on l’associera à part égale à un autre tonique du Yin, Huang Jing dans Gou Ji Wan.
    Enfin, dans les toux consomptives dues au vide de Yin, on l’associera à Mai Men Dong ou Chuan Bei Mu pour nourrir le Yin, clarifier le Poumon et transformer les mucosités.
    Pour traiter la sécheresse, on l’utilise seul, cuit à la vapeur, à la dose de 10 g, deux à trois fois par jour.
    Très humidifiant, on ne l’emploiera pas en cas de selles molles dues au vide de la Rate.

    On peut aussi utiliser le fruit de lyciet préventivement dans des préparations de la diététique chinoise.
    Pour l’apparition précoce de cheveux blancs, on fait un gruau avec 15 g de baies de Gou Qi Zi séchées et 30 g de riz rond et on en mange une à deux fois par jour.
    Pour le cholestérol et l’obésité, On l’associera aux fruits d’un troène à feuilles brillantes, petit arbre cultivé pour sa floraison très parfumée et, acceptant très facilement la taille, utilisé lui aussi pour les haies et même pour les bonzais. On prendra garde aussi à sa toxicité. Dans la recette chinoise on lave 250 g de baies de Gou Qi Zi et 250 g de Nu Zheng Zi. On les fait sécher puis on les broie pour en faire de la poudre dont on boit 10 g diluée dans de l’eau matin et soir. Il est possible d’ajouter un peu de sucre roux pour améliorer le goût.
    Pour la stérilité masculine, on met 10g de He Shou Wu, la racine du polygonum, dans de l’eau et on chauffe à feu moyen pendant 1h. On mâche matin et soir 20 g de Gou Qi Zi. Quand ils sont bien mastiqués, on les avale avec le jus obtenu avec He Shou Wu.
    La diététique chinoise préconise de manger le fruit de lyciet en petite quantité pour les personnes faisant de l’hypertension, étant en état de stress ou mangeant beaucoup de viande.
    Par ailleurs, il faudrait éviter de manger du « goji » si vous prenez un anticoagulant et ne pas mélanger la baie avec du thé vert.

    À l’époque des premiers traités, les lyciets faisait partie des nombreuses drogues préconisées par les médecins taoïstes pour atteindre l’immortalité (terrestre). On rapporte qu’aux cours des siècles, de nombreux taoïstes, médecins et poètes célèbres ont pris des décoctions de lyciet dans l’espoir de prolonger leur vie comme le médecin des Tang, Sun Si Miao. Li Shizhen, reprend seize siècles après ces premiers traités, cette idée taoïste que le lyciet permettrait d’accroître la longévité.
    L’adhésion à ces croyances anciennes est toujours très forte en Chine puisqu’elle stimule aussi bien la médecine populaire que la médecine moderne et particulièrement pour cette plante le commerce médicinal international.

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