Au nombre des ingrédients « exotiques » qui font reculer d’horreur les gastronomes occidentaux les moins téméraires, on peut compter ce que les Chinois appellent les « griffes de phénix » (凤爪 [fèngzhuǎ]) ; j’ai découvert il y a peu que les Cambodgiens préféraient l’appellation tout aussi mystérieuse de « serres d’aigles » (ក្រញាំឥន្ទ្រី, prononcer « krâ-niam intri »). Chinois et Cambodgiens seraient-ils donc adeptes de la consommation d’appendices d’oiseaux rares ? La réponse est négative, bien sûr, car ces deux dénominations désignent tout simplement les membres inférieurs des plus communes des gallinacées : des pattes de poulet (appelées aussi et plus prosaïquement « pieds de poulet » : 鸡脚 [jījiǎo] et ជើងមាន់ [tieung-moanne] respectivement en chinois et en khmer).
Cette partie des volatiles, généralement délaissée sous nos latitudes, fait l’objet en Asie Orientale de recettes les plus diverses et les plus variées. Les amateurs apprécient surtout la texture croquante des cartilages et des tendons. Une chanteuse cambodgienne très connue, Aok Sokhun Kannha, se moque d’ailleurs dans une chanson très populaire des hommes d’âge mûr qui, quand ils avaient vingt-cinq ans, appréciaient le croquant des pattes de poulets et qui, depuis ils atteignent la soixantaine (et que leurs dents ont perdu de leur vigueur juvénile) sont contraints de se rabattre sur un aliment à la texture moins exigeante : la gelée d’herbes (le clip de cette chanson, qui par ailleurs me semble excellente, peut être visionné sur Youtube, ici).
On estime que les Chinois consomment chaque année près d’un demi-million de tonnes de pattes de poulet. On comprend dès lors que les exportations de pattes de poulet congelées de l’Europe vers la Chine sont l’objet de toutes les convoitises.
Les pattes de poulet nécessitent une préparation minutieuse avant de pouvoir être cuisinées : les ongles sont coupés, les pattes (qui comprennent en général la moitié inférieure du membre inférieur, depuis le genou jusqu’à l’extrémité des doigts) sont ensuite copieusement rincées à l’eau et égouttées, puis vigoureusement nettoyées à l’aide d’une brosse. Elles sont ensuite rincées et égouttées une nouvelle fois.
Lorsque l’on achète des pattes de poulet, il faut veiller à ce que la peau soit nette et brillante, la texture doit être ferme et doit avoir une certaine élasticité. On écarte sans hésiter les pattes dont la peau est tâchée, ou dont la surface est collante au toucher.
La peau et les tendons sont dévorés dans leur totalité, seuls les os sont délaissés. La partie la plus appréciée est le plus souvent la paume.
Les modes de préparation sont très variés : en salade, en soupe, à la vapeur, en sauce rouge… Nous verrons dans un prochain épisode une utilisation de ces « serres d’aigle » dans une soupe cambodgienne.
La photo ci-dessous vient du site culinaire chinois Meishichina (ici) :
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